L’installation d’un nouveau collège est souvent
facteur de rupture d’échelle et de typologie. Le nouveau collège Jean Perrin,
accueille 632 élèves et 32 internes au cœur d’un paysage urbain pavillonnaire
du vieux Nanterre. Dans ce contexte, la proposition de Brenac et Gonzalez
intègre à la fois une dimension urbaine, typologique, poétique ou même «
situationniste », dans le sens où son implantation génère des situations
particulières, non seulement avec les contextes proches mais aussi à
l’intérieur de son propre tracé.
Implantation :
La parcelle est un long rectangle qui s’étire
dans la profondeur du terrain et s’évase vers l’intérieur ; les seuls points
d’accès possibles sont situés sur sa partie la plus étroite, le long de la rue
des Goulvents.
Le volume principal est un bâtiment linéaire qui
se développe sur toute la longueur du terrain et abrite la totalité des
classes. Son implantation latéralisée par rapport à l’axe central permet de
séparer deux types d’espaces extérieurs : une cour de service et deux cours
mises en continuité l’une de l’autre.
La première cour est un parvis planté de
magnolias dont le sol en pente douce fait pénétrer naturellement dans le hall.
La seconde accueille la grande cour de récréation qui, par ses dimensions, sa
configuration et la disposition des édifices, évoque les proportions d’une
grande place urbaine (25x80m.), avec son mail planté, ses bancs et ses
lampadaires.
Ces deux espaces extérieurs majeurs sont séparés
par un grand hall traversant, très transparent – absence des cadres des
menuiseries – qui donne la lecture de toute la profondeur de la parcelle. La
continuité et la fluidité spatiale sont renforcées par l’absence de poteaux
dans le hall, doté d’une structure en pont, et par le prolongement du même sol
en pierre calcaire d’Italie, alternativement mate et polie. De même, le plafond
se prolonge vers l’extérieur pour contenir le préau. Celui-ci se poursuit
latéralement par une longue galerie couverte qui donne à la cour de récréation
toute sa périphérie.
En face du bâtiment des salles de classe,
l’autre côté de la cour est occupé par le gymnase dont la forme élémentaire et
la verticalité des percements renforcent la monumentalité.
Au fond de la perspective se trouve le
restaurant, dernier volume de la composition dont la transparence laisse
entrevoir jusqu’aux plus lointains mitoyens. Profitant d’une dilatation
latérale de la parcelle, le programme du pensionnat trouve naturellement sa
place à l’écart, protégé de l’établissement par une ceinture végétale.
Typologie scolaire :
Si en apparence toutes les écoles se
«ressemblent» entre le primaire et le collège se produit cependant une profonde
mutation dans la pratique spatiale et la configuration programmatique. L’élève
n’est plus, en effet, «sédentaire» mais «nomade» passant d’une salle à l’autre
en fonction de l’enseignement. Cette mobilité intérieure peut devenir le
support de micro-urbanités «gigognes».
Ces urbanités sont soulignées par une
différenciation entre espaces atypiques basés sur la répétition – les salles de
classes – et espaces typiques qui abritent des fonctions singulières telles que
hall, CDI,
restaurant, salle polyvalente, gymnase, pensionnat. Les premiers sont
identifiés en façades par une verticalité et la reprise d’un module formé d’une
épine dorée verticale, des fenêtres en bande et des volets roulants extérieurs
; les seconds sont reconnaissables architecturalement par des volumétries et
des systèmes différenciés.
Cette distinction porteuse de qualité(s)
spatiale(s) et urbaine(s), peut devenir un véritable vecteur de richesse
typologique car elle est construite autour de repères et d’articulations
programmatiques.
Dans cette recherche d’identification, le hall,
et le CDI
placé en suspension au dessus du hall, occupent une place centrale. Leur volume
constitue à la fois la véritable entrée et l’échangeur de flux de tout
l’établissement. La double hauteur et l’escalier monumental créent une mise en
scène spatiale, avec des effets de réflection, des transparences et des verres
colorés qui amplifient l’espace et lui procurent une certaine théâtralité.
Ce lieu central distribue la salle polyvalente
en rez-de-chaussée, les deux niveaux de classes, et enfin le CDI et l’administration. Le
gymnase, utilisé par l’établissement comme par la ville, est accessible depuis
la cour de récréation mais aussi depuis la rue, bénéficiant ainsi d’un
fonctionnement autonome.
Les façades :
Répondant aux différentes contraintes de
protection solaire, d’occultation et d’intrusion, les architectes ont mis au
point avec le cabinet Van Santen un principe de façades modulaires et
systématiques. Cette répétitivité a permis d’aboutir un détail de châssis d’une
grande finesse et d’un haut niveau de technicité.
Les façades des classes sont vivantes,
mouvantes, elles vibrent au gré des variations solaires ou des cours dispensés
dans les classes. Les volets coulissent sur de longues glissières verticales,
constituées d’épines dorées qui rappellent certaines réalisations de Jean
Prouvé ; ils peuvent être complètement ouverts ou complètement fermés,
transformant l’aile des classes en une composition abstraite.
Tabliers des volets et panneaux d’habillage des
allèges ont été réalisés à partir des mêmes produits et selon un même profilé,
afin d’obtenir une continuité parfaite du matériau permettant une totale
abstraction des volumes.
Le second matériau dominant du projet est la
pierre calcaire ; elle est semi-porteuse – épaisseur entre 5 et 8 cm – et
recouvre toutes les autres façades. Par référence à la tradition, la pierre est
utilisée ici pour exprimer la monumentalité (au sens de l’institution), et
renforcer par l’architecture l’image de l’école. Par son signifiant et le
symbole qu’elle représente, elle valorise chacun : élèves, enseignants,
personnel administratif.
L’ensemble offre une esthétique cohérente et
sereine, un silence sans absence, la recherche est à la fois ancrée dans les
mémoires et dans le présent.
Les matériaux :
Le collège est le résultat d’un travail raffiné,
« cousu main », sur la matière et les variations de teintes et de reflets que
les éléments naturels peuvent revêtir : la pierre calcaire adoucie, polie ou
striée, l’aluminium anodisé, le béton brut lasuré, l’acier inox... Ainsi, au
choix de la couleur a été préféré celui de la texture et des matériaux sensibles
et très réactifs aux variations de la lumière. Deux teintes majeures ont été
utilisées ici : un brun métallique pour les châssis que l’on retrouve à
l’intérieur du bâtiment pour les menuiseries intérieures, les circulations … et
la teinte champagne de l’anodisation des « épines » qui se décline pour mettre
en scène les éléments singuliers du projet, comme les boites à lumière du hall
principal ou le volume des halls secondaires.