Le projet conçu pour le 23ième FESTIVAL INTERNATIONAL DES JARDINS DE CHAUMONT-SUR-LOIRE plonge le spectateur dans
une dimension intermédiaire où le monde terrestre et le monde divin se rencontrent.
Un passage à fleur d’eau invite le visiteur à se diriger vers une plateforme circulaire enveloppée d’un manteau de branches mortes; au centre, une plante de lotus issue d’un hublot envahit l’espace de son parfum enivrant.
Au milieu du bassin d’eau la ligne de tension entre la terre et le thòlos métaphorise le parcours salvateur que l’homme doit entreprendre pour clarifier sa vision et ainsi s’éloigner du chaos du monde sensible.
Aux alentours, l’océan primordial de la création est un miroir d’eau teint en rouge d’où émergent des nénuphars candides, dont les tons de couleur deviendront de plus en plus vifs pendant l’exposition en raison de la contamination des racines avec le colorant.
Les nénuphars sont des plantes aquatiques liées, selon la mythologie, à l’intégrité du corps et de l’esprit: les racines se développent dans la boue mais la fleur s’épanouit au fil de l’eau pour s’ouvrir au soleil.
De même, l’être humain, généré de la poussière du sol, est lié à la terre (humus) du sentiment d’humilité (humilitas) qui le préserve de la chute, jusqu’au moment où il succombe au désir de s’élever pour s’ouvrir à la conscience.
“Le serpent était le plus rusé de tous les animaux des champs, que l’Éternel Dieu avait faits. Il dit à la femme: Dieu a-t-il réellement dit: Vous ne mangerez pas de tous les arbres du jardin? La femme répondit au serpent: Nous mangeons du fruit des arbres du jardin.
Mais quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit: Vous n’en mangerez point et vous n’y toucherez point, de peur que vous ne mouriez.
Alors le serpent dit à la femme: Vous ne mourrez point; mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et que vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal.
La femme vit que l’arbre était bon à manger et agréable à la vue, et qu’il était précieux pour ouvrir l’intelligence; elle prit de son fruit, et en mangea; elle en donna aussi à son mari, qui était auprès d’elle, et il en mangea. Les yeux de l’un et de l’autre s’ouvrirent, ils connurent qu’ils étaient nus”.
Le serpent ne mentait pas, puisque la compréhension du bien et du mal l’assimile à Dieu, mais au prix de la perte d’innocence.
Le premier péché commis par l’homme est l’orgueil, le plus grave parmi les vices, car il viole les commandements de Dieu. Malgré tout, la trahison est aussi la révélation qui a permis à Adam et Eve d’acquérir une conscience morale.
Les nénuphars qui émergent de l’eau colorée représentent l’humanité entière qui, pour la connaissance, renonce à sa pureté en se tachant de la couleur rouge du péché.
Au centre du bassin, l’élément cylindrique rappelle la couronne d’épines, symbole du sacrifice que Jésus Christ a accompli pour sauver le genre humain, mais aussi le chakra de la couronne, centre d’énergie subtil, qui se situe dans la partie supérieure de la tête, appelé aussi “lotus des milles pétales” et symbolise la révélation finale. De la même façon, l’espace circulaire veut être le lieu de la réconciliation spirituelle.
La plante de lotus qui émerge de la fissure gravée dans le pavage se charge des symbolismes qui, depuis des millénaires, l’associent au mythe de la création. La fleur suit le rythme circadien d’une complémentarité où se succèdent tour à tour masculin et féminin, jour et nuit, veillée et sommeil. Elle représente ainsi le symbole de la régénération et de la vie éternelle.
Description des éléments Le projet se compose d’un seul élément accessible au public constitué d’une estrade longue 11m et une plateforme circulaire de 4 m de diamètre, toutes les deux composées d’une sous-structure en sapin sur laquelle sont fixées des planches en bois, qui constituent le pavage.
La zone centrale du lot sera creusée à 40 cm de profondeur afin d’accueillir le bassin: si le plan semble flotter dans l’eau, en réalité il est soutenu d’une série d’appuis qui insistent sur le sol sec, tandis que la piscine est tracée autour de l’espace piétiné.
L’image que nous voulons rendre est celle d’un pont suspendu qui rappelle le hashigakari du théatre Nō japonais, le couloir qui unit le loge de l’acteur à la scène ; le lieu du passage entre humain et surhumain, où l’acteur n’est plus homme et pas encore personnage.
La forme ébrasée de la passerelle accentue la perspective de façon à ce que le parcours semble encore plus long.
L’espace centrale émerge à l’intérieur de la scène, les parois de la chambre sont constituées par des gerbes de branches mortes contenues en trois ordres de coffrages en bois, vissés entre eux et disposés autour du podium circulaire. Ainsi, tous les éléments sont isolés du bassin qui fait le tour du cylindre.
Un bassin mineur se situe au-dessous du chemin piétiné et accueille la plante de lotus qui semble pousser du sol. En effet, la tige du lotus est composée de nombreuses fibres fortement entrelacées, qui permettent à la petite fleur de s’épanouir, jusqu’à un mètre hors l’eau pour les Nelumbo moyen-petits. En revanche, les nénuphars ont des tiges plus molles, parcourues d’amples canaux permettant le passage de l’air et assurant le flottement.
Dans ce projet, les plantes aquatiques, blanches au début, flottent sur la surface sanguine qui trahit l’audace de la nature artificielle.
Du colorant organique est ajouté à l’eau pour donner aux fleurs une variation de couleurs, du rose au carmin, pendant toute la durée du Festival, selon la capacité de chaque plante à absorber le composé.